Les soeurs GARCIA

Plus connues sous les noms de:

La MALIBRAN 1808-1836

Pauline VIARDOT 1821-1910

portrait

A douze ans Charles est emmené par sa mère entendre la Malibran dans Otello de ROSSINI. C'est ce jour-là qu'il aurait rêvé de se consacrer à l'art musical. A quatorze ans ce sera le Don Giovanni de MOZART qui lui fit éprouver, écrira-t-il "un tressaillement de bonheur".La MALIBRAN avait vingt-deux ans, Charles douze. Elle ne fut pas à proprement parler une muse. Nous dirons qu'elle fut la première sirène qui le charma.

En 1840, alors pensionnaire de la Villa Médicis à Rome, GOUNOD, âgé de vingt-deux ans, rencontre les VIARDOT en voyage de noces en Italie, Pauline avait dix-neuf ans, elle chantait et appréciait les talents de GOUNOD comme accompagnateur. Mais leur vraie rencontre aura lieu à Paris durant l'été de 1849. C'est le violoniste et chef d'orchestre SEGHERS qui fit se re-rencontrer à Paris Charles et Pauline. L'entretien qui devait être court dura deux heures. Pauline fut subjuguée et charmée par GOUNOD, son génie l'étonna, elle lui trouva noblesse et distinction, elle assura son amie Georges SAND que son nouvel ami appartenait à la même sphère que MOZART. Les soirées des VIARDOT, rue de Douai à Paris, réunissaient un ensemble exceptionnel d'artistes et d'admirateurs. Le goût, le désir de GOUNOD pour toutes sortes de musique était insatiable, et plus tard Pauline prétendra qu'elle faillit y perdre la voix !

Comprenant quelle pourrait être son influence dans le monde de la musique lyrique après le triomphe de Pauline dans "Le Prophète" de MEYERBEER, GOUNOD la persuade que son ami Emile AUGIER devrait lui écrire un livret. De son côté, Pauline, étonnée par les compositions que GOUNOD lui montre, en particulier la mélodie "Le Vallon" sur un poème de LAMARTINE, décide que si GOUNOD en écrit la musique et que si AUGIER accepte de faire le livret, elle chantera le rôle principal. Ainsi fut fait. "Madame VIARDOT ! s'écria AUGIER, mais bien sur, tout de suite !". Le sujet choisi fut "Sapho", peut-être par Pauline elle-même. Ce sera le premier opéra de GOUNOD. Il a trente trois ans.

Pauline VIARDOT n'était pas belle. Avec son dos voûté, ses yeux saillants, ses traits forts, elle était même assez laide, mais d'une laideur attachante. Henri HEINE la comparait à un monstrueux paysage exotique. Le jour de ses fiançailles avec VIARDOT, mariage arrangé par Georges SAND, un peintre belge aurait dit au futur mari: "Elle est atrocement laide mais, si je la revois, je l'aimerai". Sa voix, disait Camille SAINT-SAENS, n'était ni une voix de velours, ni une voix de cristal; elle évoquait plutôt les oranges amères, faite pour la tragédie, les vers épiques, les oratorios. Sa culture musicale était telle qu'elle impressionna une fois son auditoire en chantant un air merveilleux mais inconnu de MOZART qu'elle avoua après avoir elle même composé.

Ayant invité GOUNOD chez elle à la campagne, celui-ci y resta quelque temps en l'absence de Pauline et en profita pour terminer son opéra. Quand elle revint, il lui joua sa composition et la chanta. Elle fut émerveillée et apprit l'oeuvre rapidement par coeur. GOUNOD écrira: "Ce fut le plus extraordinaire tour de force musical que j'ai jamais vu; il donnait la mesure des capacités étonnantes de cette merveilleuse musicienne".

A la première de Sapho, le 16 avril 1851, on fut surpris et généralement satisfait par la nouveauté et la fraîcheur. C'était très nouveau, très différent. La critique ne fut pas favorable, elle était en fait décontenancée, pressentant quelque chose de neuf. Mais BERLIOZ, à l'issue de la représentation dira à GOUNOD: "Bravo, voyez, j'ai les yeux pleins de larmes'"

Hélas cette amitié si enrichissante se terminera bêtement et mal.

Quand GOUNOD annoncera son mariage en avril 1852 avec Anna ZIMMERMANN, Pauline sera surprise car Charles ironisait sur les ZIMMERMAN et leurs quatre ingrates et sombres filles ! "On repoussera le mariage", avait promis GOUNOD, pour que Pauline, prête à accoucher, puisse être présente. Pauline invita à plusieurs reprises Charles et sa future belle famille. Ils ne s'y rendirent point. Le mariage fut discret, Pauline n'y fut pas invitée. Elle envoya un bracelet en cadeau de noces. Il fut retourné ! Un mot anonyme aurait annoncé qu'elle avait été sa maîtresse. Ainsi, pour une jalousie injustifiée, se termina cette amitié. Pauline VIARDOT fut profondément heurtée, elle avait accueilli GOUNOD, l'avait encouragé à écrire son premier opéra et ouvert les portes du théâtre ainsi que les salles de concert à Londres. Elle en parlera à Georges SAND comme d'un Tartuffe. Non, c'était un faible ! Elle lui gardera cependant son admiration, espérant que son génie ne serait pas atteint par ses amitiés du moment où par son propre caractère.

Le 16 février 1850, Pauline VIARDOT avait fait part à Georges SAND de son bonheur d'avoir rencontré ce jeune compositeur à qui la notoriété paraissait assurée. "Sa musique est aussi divine que sa personne est noble et distinguée. Bien qu'il soit présentement inconnu, GOUNOD a un avenir immense". GOUNOD était certainement plein de charme à l'époque, bien de sa personne, beau parleur, brillant en conversation, d'une grande élévation d'esprit, de large culture, réceptif aux idées nouvelles et continuellement entouré de jolies femmes. Très émotif et de réactions imprévisibles, ses amis de jeunesse disaient: "Un jour il grimpait aux arbres et chantait tous azimuts, un autre il entrait en transe religieuse. Un jour il embrassait le mari, le lendemain il courtisait la femme".

 

Jean-Pierre GOUNOD

Retour liste

Click to return
in the list.